« Moi », dit souvent mon voisin à qui veut l’entendre, « j’ai trimé toute ma vie pour que celle de mes enfants soit meilleure. Je ne comprends pas que mes impôts servent à accueillir
toujours plus d’immigrés plutôt qu’à améliorer l’avenir de mon fils, né ici lui ! »
« Nous », disent les Catalans, les Lombards, les Flamands, « nous
sommes plus travailleurs que les fainéants des provinces voisines. L’argent que nous gagnons doit rester dans notre région. C’est nous qui le méritons. On ne veut plus compenser le laisser-aller des autres. »
« Moi et mes petits camarades financiers », dit l’inénarrable docteur Schaüble, « nous savons mieux que tout le monde ce qui est bon pour l’Europe. En tant qu’Allemand prospère, je refuse
de cotiser pour éponger la dette bien méritée de ces tricheurs de Grecs. (1)»
« En tant que président des USA, je suis le maître du monde », se persuade Donald Trump. « Je
ne laisserai plus aucun métèque pénétrer chez moi et je rayerai de la carte tout pays faisant mine de lever le menton. Je peux le faire et je le ferai ! »
« Nous », rigolent doucement
les vrais maîtres du monde que sont les invisibles marionnettistes des diverses internationales de la finance, de l’agroalimentaire, des énergies fossiles ou de la mainmise sur le vivant au détriment de la vie humaine, « on
sait où on va. Une petite épidémie par-ci, un petit krach par-là, une pénurie concertée, un coup de pouce à l’économie parallèle de la drogue, et hop ! nous résolvons le problème
de la surpopulation. A mort les pouilleux, nous avons besoin d’espace pour nos propres familles, parce que nous le valons bien, non ?! »
« Moi », se dit Dieu de temps en temps quand il jette un œil sur
sa “création“, « ces gens me fatiguent. Il est peut-être venu le temps [ je sais bien qu’il n’existe pas ! (rires) ] de mettre fin à l’expérience. On dirait bien que malgré la
totale liberté et le super terrain de jeux que je lui ai offerts, l’Homme ne veut toujours pas grandir. Il doit y avoir un bug qui m’a échappé dans sa programmation. L’incapacité de penser le partage, peut-être ?...
Allez, à refaire ! »
(1) Lu dans Marianne du 13 octobre, à propos du changement de poste de Wolfgang Schaüble , abandonnant son rôle de ministre des Finances pour
prendre la présidence du Bundestag : « … Au même moment, la Banque centrale européenne révélait que la crise grecque avait rapporté près de 8 milliards d’euros à la BCE
entre 2012 et 2016, via les revenus des intérêts des emprunts d’Etat grecs, dont 1,34 milliard ont fini dans les caisses de l’Allemagne. Au plus fort de la crise grecque, les Européens avaient envisagé de rétrocéder
ce pactole à la Grèce, histoire de ne pas s’enrichir sur le dos d’un pays à qui l’on reproche son endettement. C’est Schaüble lui-même qui a mis son veto. Rien que pour ce geste, il était naturel
de saluer ce grand personnage, symbole d’une Europe de la solidarité et du partage. » Jack Dion