Que vais-en faire ? La question m'a perturbée, dérangée, fouillée pendant quelques heures. Et continue à vivre en filigrane de ma vie tranquille. En fait, je ne suis pas en colère, pas de cette colère
qui allume des moteurs d'action, non, je suis dans le dégoût, de celui qui fait se retirer du "monde", tourner le dos plutôt qu'affronter l'ennemi qu'on pense invincible. Lâcheté immédiate ou connaissance ancestrale ?
Trop facile.
Une sorcière eurasienne dissipant les brumes charentaises, un chaman africain perdu dans une Belgique écumeuse, un livre sans auteur dispensant des cours en miracles, et d’autres, m’ont tous, accord unanime, appris
une chose : le monde extérieur visible n’est que le miroir virtuel où s’entrechoquent mes désordres intérieurs. Ma colère ne fera qu’exacerber le bordel. J’y renonce illico.
Oui, j’irai
voter en avril, réaction. Mais dès maintenant, action, je me remets au diapason de la beauté naturelle et de la force de vie de mon environnement présent. J’ai aperçu hier les premières lunaires, dressant leurs
hampes mauves au-dessus du tapis jaune des fleurettes qui résistent à l’hiver. J’ai observé ce matin sur les pentes du Parnonas les grands corbeaux en cours de parade nuptiale. Je guette l’éclosion des premières
fleurs d’amandiers, encore, ou déjà, en boutons. Je râle après les chattes enamourées qui sonorisent les nuits de la terrasse et saccagent la terre des pots, mais j’en souris vite et me rendors.
Bref, je
regarde le printemps pointer son nez et je me dis qu’il le pointera encore dans quelques siècles, quand les comptes en banque de Fillon, les hurlements de Macron ou les illusions de Hamon ne seront pas même un sujet d’interrogation
pour les terriens d’alors. Petitesse et ascendance, roue sans fin. Vivons bien. Le mieux possible.
[ quelques pétales printaniers dans la cuisine, pour le moral ]