Il pleut. Le ciel grec sanglote. Sur les balcons, les femmes cachent leurs étendoirs sous de grandes bâches plastiques. J’imagine que les chaussettes restent bien humides là-dessous. Dans les cafés, les hommes ont abandonné
les terrasses et sont revenus devant les écrans de télé. Le football a repris la main, pardon, le pied sur la politique. Les illusions ont fondu au fer chaud de la résistance européenne. Une éphémère
espérance est balayée chaque matin avec les détritus accumulés par la pluie dans des caniveaux qui ne débouchent sur aucune évacuation et créent ainsi chaque jour des mares, des ruisseaux, des torrents qui cascadent
dans les ruelles avant de rejoindre le port et de se mêler aux flots boueux engendrés par les travaux interminables du prolongement de la digue. C’est une dissolution, une perte de substance, une résignation.
Rien de tout cela
n’est vraiment pensé, seulement ressenti, éprouvé. On enfile des chaussettes humides dans des chaussures trempées et on regarde s’éteindre des étincelles de fierté douchée, revenir les siècles
récents de domination étrangère, aujourd’hui à visage allemand dans la conscience collective mais en fait avatar polymorphe d’Ottoman, de Vénitien et autres barbares oppressants.
La météo
est ici du ressort de Zeus. Il est grec, Zeus. Et il pleure avec ses petits clones humains. Pas content mais désarmé, comme eux. C’est vraiment l’impression que je retire de ces dernières semaines. Un grand gâchis très
métaphorique et que je décide créateur, également, des désordres climatiques qui me font pester le matin. Après tout, c’est bien connu, la pensée crée le monde…