Lundi de Pâques. Résurrection accomplie en orthodoxie.
L’autorisation gouvernementale a été donnée aux Grecs pour retrouver leur vie extérieure traditionnelle. Après sept mois d’isolement,
mental et social, m’asseoir en terrasse me donne envie de reprendre la plume. Curieusement la tranquillité imposée jusqu’ici a stérilisé chez moi toute envie de m’exprimer. La cacophonie des infos et intox, des
consignes et contre-ordres, des étalages d’egos narcissiques ou paniqués, m’a fait taire.
Quant à la quasi universelle demande de retour à la « vie d’avant », elle me fait carrément
flipper. À quoi sert tout cela si personne ne veut modifier son comportement, se sentir responsable, et si chacun exige de continuer comme avant ? À part faire de la place temporairement sur un globe surpeuplé, cette pandémie
n’aura guère fait grandir l’humanité en sagesse me semble-t-il. Nous ne méritons pas cette terre et la planète a raison de vouloir nous en expulser. Un processus de survie égoïste à tous les étages,
du virus chassé de son territoire aux cinglés du transhumanisme prêts désormais à saccager Mars.
Je m’étais pourtant promis de ne pas rajouter ma pierre aux tombereaux d’imbécillités
bourdonnantes, mais on dirait que c’est fait. Mon pessimisme l’a emporté.
Heureusement, cela ne dure pas chez moi. Sans renier le constat précédent, je peux aussi regarder le monde autrement. Je vois ce matin des enfants
courant sur le sable malgré l’absence des jeux de plage. Je vois des ados chahutant dans les vagues malgré la fraîcheur de l’eau. Je vois des jeunes parents attentifs le smartphone à la main et des grands-parents protecteurs,
dépassés mais amusés. Une génération adaptée aux temps présents. Parmi les derniers arrivés, des vieilles âmes averties, certainement munies de leur bon de mission. Tout est en ordre.
Dans
mon petit cerveau surchauffé, se pose alors la question de mon rôle dans l’histoire… Et bien… Je suis là, simplement. Avec mon parcours et mes capacités. Attentive et disponible. Et c’est probablement ce
que l’Univers attend de chacun de nous.
Alors c’est promis. C’est la dernière expression écrite de mon pessimisme. Je bois aujourd’hui dans le verre à moitié plein. Et l’ouverture des tavernes
tombe à pic pour cela, non ?
Geia mas ! À notre santé !, un salut quotidien machinal qui n’a jamais autant mérité son nom.